Modèle médical VS modèle social du handicap
Fiche de Conseils
Sensibilité chimique multiple (SCM)
Modèle médical VS modèle social du handicap
Épauler la Communauté et Retirer les Barrières (ECRoB)
Qu’est-ce qu’un handicap ?
En vertu de la législation canadienne (Loi canadienne sur les droits de la personne), la sensibilité chimique multiple (SCM) est reconnue comme un handicap. Cette reconnaissance s’accompagne de nombreux avantages et protections, tels que l’éligibilité aux prestations d’invalidité et aux accommodements.
En droit canadien, le terme « handicap » est très large. Il englobe les problèmes de santé physique ou mentale qui empêchent une personne de faire certaines choses, ainsi que les barrières créées par les structures et les normes sociales. Il reconnaît que les handicaps peuvent aller et venir, durer longtemps et ne pas être évidents pour les autres. Lorsque l’on envisage le handicap sous l’angle des droits de la personne, les expériences et les besoins personnels de l’individu font partie intégrante de la compréhension, même si les décideurs peuvent rechercher des données factuelles sur les besoins d’une personne liés à son handicap auprès de tiers fiables, tels que des professionnels de la santé.
Évolution de la définition
Le concept du handicap a considérablement évolué au cours des dernières décennies. Auparavant, le handicap était perçu comme un problème personnel ou une maladie nécessitant une thérapie ou un traitement particulier. Cette façon de penser, appelée « modèle médical » du handicap, tentait de traiter ou de guérir les problèmes de santé afin d’aider les personnes handicapées à s’intégrer dans la société. Elle considérait le handicap comme quelque chose d’anormal qu’il fallait faire soigner par des médecins ou des professionnels, ce qui pouvait avoir un impact négatif sur l’estime de soi des personnes qui s’identifiaient fortement à leur handicap.
Cependant, la compréhension moderne a évolué vers un « modèle social », considérant le handicap comme une construction sociale. Ce modèle sépare les « handicaps », qui sont des limites fixées par la société, des « déficiences », qui sont les effets d’une
condition. Il encourage la suppression des obstacles dans la société, le soutien à une vie indépendante et l’introduction de changements dans notre monde social et physique pour inclure toutes les capacités. Cela favorise l’équité et l’inclusion. Les partisans de ce modèle affirment que les problèmes rencontrés par les personnes handicapées proviennent davantage des barrières de la société que de leurs conditions médicales.
La compréhension du handicap par la Cour suprême du Canada reflète de plus en plus le modèle social. Selon l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantit l’égalité des droits, de nombreuses difficultés rencontrées par les personnes handicapées ne découlent pas de leurs déficiences, mais des réactions de la société à ces déficiences. Ces réactions de la société peuvent prendre la forme de barrières physiques, d’informations inaccessibles ou d’attitudes empreintes de préjugés, autant d’éléments qui peuvent empêcher une pleine participation à la vie de la société. Ce point de vue est partagé par la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (CNUDPH ). La CNUDPH et la Cour suprême du Canada estiment que, lorsque nous définissons le handicap, nous devons tenir compte de la manière dont la société perçoit et traite les personnes handicapées, ainsi que des limites des handicaps eux-mêmes.
Au Canada, les défenseurs des droits des personnes handicapées, qui soutiennent depuis longtemps le modèle social, ont réussi à faire adopter des politiques et des lois visant à réduire les barrières sociétales et comportementales auxquelles sont confrontées les personnes handicapées. Il s’agit notamment de veiller à ce que la loi reconnaisse comme une forme de discrimination le fait de traiter différemment une personne en raison de son handicap.
Modèle médical
Le modèle médical définit le handicap comme un écart par rapport à la normalité qui doit être « corrigé » par un traitement médical. Il s’appuie sur des preuves d’experts et met fortement l’accent sur le diagnostic, tout en cherchant à réhabiliter ou à guérir les conditions biomédicales afin d’aider les personnes handicapées à s’intégrer dans la société. Ce modèle néglige souvent les besoins de la personne et conduit à une perte
d’indépendance, à des attentes réduites et à un moindre contrôle sur leur vie. Cette perspective peut avoir un impact négatif sur l’estime de soi des personnes qui considèrent leur handicap comme un élément essentiel de leur identité. Au lieu de reconnaître et accepter les diverses expériences et perspectives liées aux handicaps, le modèle médical risque de renforcer une notion étroite et potentiellement néfaste de la « normalité », en mettant de côté les contributions uniques et la valeur de ceux qui ne correspondent pas à cette définition.
Modèle social
Le modèle social du handicap est un cadre qui considère le handicap non pas comme un problème individuel, mais plutôt comme un problème de société. Ce n’est pas l’état physique ou mental de l’individu qui le rend handicapé, mais les barrières, les attitudes négatives et les exclusions de la société. Le modèle social s’oppose au modèle médical, qui considère le handicap comme un problème interne à l’individu qu’il convient de traiter ou de guérir.
L’adoption du modèle social a permis une meilleure inclusion, une meilleure compréhension du public et un accès plus rapide à un soutien approprié, réduisant ainsi la stigmatisation et accélérant l’assistance. Le modèle promeut des soins centrés sur le patient, respecte les besoins et les décisions individuels et valorise les choix de traitement éclairés par des conseils médicaux. Il encourage également à éviter les procédures inutiles basées sur des « normes » et à se concentrer plutôt sur les besoins et les valeurs de l’individu.
En outre, le modèle social ne rejette pas le traitement médical, mais modifie la façon dont nous l’envisageons. Les médecins doivent aider dans un cadre médical, mais ils ne doivent pas dire aux gens comment vivre leur vie. Cette approche est particulièrement pertinente pour les plus d’un million de Canadiens vivant avec la SCM, pour lesquels le modèle social garantit l’équité, l’accessibilité et l’inclusion dans tous les aspects de la vie.
La SCM et le modèle social du handicap
Les personnes atteintes de SCM ont souvent du mal à obtenir un diagnostic en temps voulu, ce qui peut prendre plusieurs années. Cela est dû en grande partie au fait que de nombreux professionnels de la santé ne connaissent pas la sensibilité chimique multiple ou ne la reconnaissent pas comme une condition légitime. Sans diagnostic formel, ces personnes peuvent avoir du mal à obtenir des prestations d’invalidité ou à demander des accommodements.
Dans ces cas, le modèle médical du handicap peut s’avérer insuffisant, car il se concentre principalement sur la nécessité d’un diagnostic formel et vise à « guérir » l’individu. Selon le modèle médical du handicap, le problème serait la réaction corporelle de l’individu à des déclencheurs chimiques. Le modèle social du handicap, quant à lui, affirme que ce n’est pas la maladie elle-même qui handicape la personne, mais plutôt la réaction de la société.
Dans le contexte de la SCM, le modèle social suggère que la réponse de la société aux personnes atteintes de SCM est la cause réelle du handicap. Ces réactions peuvent inclure un manque de compréhension, des barrières à l’accessibilité (tels que l’exposition aux parfums/fragrances, et aux produits chimiques toxiques dans les lieux publics) ou des attitudes négatives.
Pour y remédier, le modèle social promeut une société plus inclusive. Un exemple de ce modèle pour la communauté SCM pourrait être la création d’espaces sans parfum ni fragrances et l’usage de produits les moins toxiques. Cela permettrait non seulement de reconnaître et de valider leurs expériences, mais aussi d’éliminer activement les barrières qui rendent les environnements quotidiens inaccessibles ou nocifs pour eux. Cela démontre que l’accent mis par le modèle social sur le changement sociétal, plutôt que sur les « remèdes » individuels, peut fournir des solutions plus efficaces pour les communautés telles que celles qui sont atteintes de SCM.
Scénarios
Scénario n° 1 : Déficience auditive versus communication sociale
Un homme malentendant est invité à un séminaire public. Cependant, le lieu n’est pas équipé d’un système d’aide auditive approprié.
- Modèle médical : Sa déficience auditive l’a empêché de participer au séminaire.
- Modèle social : L’absence de système d’aide auditive ou d’interprète en langue des signes a entravé sa participation. Cela pourrait également limiter l’expérience des participants plus âgés ayant une perte d’audition liée à l’âge.
Scénario n° 2 : Défis en matière de mobilité et infrastructure éducative
Une jeune fille avec un handicap physique souhaite intégrer une école publique populaire. Cependant, l’école comporte plusieurs niveaux et n’est pas desservie par un ascenseur.
- Modèle médical : Le handicap physique de la jeune fille l’empêche de rejoindre l’école car elle ne peut pas monter les escaliers.
- Modèle social : L’absence de dispositifs d’accessibilité tels que des ascenseurs ou des rampes d’accès l’empêche de fréquenter l’école. Ces dispositifs seraient également utiles aux autres élèves qui portent des livres lourds ou à ceux qui souffrent de blessures temporaires.
Scénario n° 3 : Déficience visuelle et accessibilité numérique
Une femme malvoyante souhaite acheter un produit en ligne sur un site de commerce électronique très recommandé. Cependant, le site n’est pas conçu avec des fonctions d’accessibilité.
- Modèle médical : La déficience visuelle de cette femme l’empêche d’effectuer un achat car elle ne peut pas naviguer sur le site web.
- Modèle social : L’absence de conception accessible du site web, comme un texte alternatif pour les images ou la compatibilité avec les lecteurs d’écran, empêche la femme d’effectuer un achat. Une conception accessible serait également bénéfique pour les personnes âgées, les personnes ayant des troubles visuels temporaires ou les personnes utilisant des appareils dotés de petits écrans.